Il n’est pas facile d’écrire un livre sur la gestion des rédacteurs techniques. D’une part, parce qu’un auteur doit composer avec tous les autres livres d’auto-assistance pour les gestionnaires. D’autre part, parce que les rédacteurs techniques ne sont pas si différents des autres employés qui doivent être gérés, au-delà d’avoir une certaine créativité, et d’être plus ou moins susceptibles. Pendant des années, les rédacteurs techniques ont souffert en tant qu’employés de ne pas être reconnu comme une profession légitime. Et malgré la reconnaissance du gouvernement américain à ce que les rédacteurs techniques forment une profession distincte, la situation ne s’est pas améliorée dans d’autres parties du monde. Cela ne laisse pas grand-chose à un consultant américain en gestion de la documentation pour fonder son guide pratique.

En dépit de ces obstacles, ce guide pour les responsables de la documentation, écrit par Richard L. Hamilton, est un bijou – une syntaxe clair et simple, solidement construit, et contenant beaucoup de nourriture pour la pensée pour les responsables de la doc et les rédacteurs techniques des deux côtés de l’Atlantique. Composé de 250 pages, le guide reprend pas à pas ce qui a déjà été traité sur le sujet de la profession en plus d’ajouter une nouvelle perspective : celle d’un responsable de la documentation (dont la présence fantomatique de son ombre, le rédacteur technique, qui se fait ressentir tout au long de pages).
Peu de choses nouvelles peuvent être dites sur la façon de diriger le changement et la façon de construire une équipe motivée. Obtenir une stratégie pour la première, et s’écarter du chemin pour la seconde, sont des conseils de gestion qui sont à la fois les meilleures pratiques ainsi que les plus banales. La première partie du livre traite sur les éléments de la rédaction technique et sur le rôle du pouvoir et de l’influence et couvrent un terrain bien connu grâce aux deux premiers chapitres qui se focalisent la gestion des personnes et la celle des projets.

Les premiers chapitres sur le travail avec les ressources humaines, l’embauche et le licenciement sont intimement liés à la loi Américaine et sa culture d’entreprise. Le responsable de documentation qui s’y trouve est très américain – il suit les procédures, gère ses propres problèmes, ne fait pas de vagues, et est un excellent joueur d’équipe. Mais lui, aussi, lutte pour sa position. Obsédé par le dépassement de soi et d’avoir son équipe de rédacteurs techniques transcender leurs performances précédentes. Les lecteurs Européens seront perplexes devant un si profond désir d’avoir l’approbation de l’autre, la gestion du changement en période de crise et de la façon dont les Américains motivent leurs équipes ainsi que leur sérieux face à l’évaluation de la performance d’un employé et l’effroyable affaire de classement et de déclassement de ces derniers.

Mais d’un autre côté, peut-être est-ce cet individualisme à toute épreuve qui rend l’Amérique un pays si attractif pour les rédacteurs techniques ? Et c’est peut-être pourquoi M. Hamilton a failli appeler son livre « À la tête des rédacteurs » au lieu de « Gérer les rédacteurs ». Malheureusement, comme le souligne l’auteur, la documentation technique, en particulier en Europe, vit au bas de la hiérarchie dans la plupart des organisations.
Beaucoup de lecteurs travaillant en Europe trouveront que les parties les plus enrichissantes du guide—dans la conclusion du chapitre sur la localisation d’une documentation. Certains « content strategists » sont d’avis que la prochaine grande idée sera la question de localisation. Il est à noter aussi que le chapitre dédié sur la gestion de la technologie et la localisation de la documentation contient une excellente explication des bases de la rédaction technique. Chaque étape est méticuleusement expliquée : son internationalisation, sa traduction et sa planification à court terme. Les paragraphes sur le single-sourcing sont aussi une piqure de rappel à la réalité qu’il n’y a vraiment pas une bonne façon de faire du contenu parfaitement à la fois sur papier et électroniquement.

Ce livre est publié dans une période où l’économie est sensible et où de nombreux responsables de la documentation et de rédacteurs techniques devront justifier leurs projets ou leur existence même. Les conseils de l’auteur sur la façon de créer un business case se veut une approche cohérente spécialement dédiée aux équipes de documentation. Le fait qu’une équipe soit considérée comme un centre de profit ou de perte est en grande partie une question de perception venant de la haute direction d’une entreprise et vous aidera sur la façon de gérer au mieux la vôtre au moment opportun.

Deux autres sections très enrichissantes traitent des avantages et des inconvénients de l’adoption de la technologie XML et de la gestion de contenu. Le chapitre sur le XML comprend une évaluation bien équilibrée des grammaires XML telles que DocBook et DITA. Quant au chapitre « Gestion du contenu », bien que l’Internet ait joué un rôle dans l’attention porté sur son importance, celui-ci nous rappelle que le contenu est toujours la première priorité des responsables de documentation. Tout cela n’est pas surprenant cependant, étant donné que M. Hamilton lui- même est membre du Comité technique DocBook d’OASIS. Son XML Press était, dans le passé, un sponsor du CSForum.

M. Hamilton a écrit un livre pour tout le monde : le responsable et le rédacteur, l’employeur et l’employé. Le revers de la médaille de Managing Writers – dont le titre pourrait tout aussi bien être Writers Being Managed – se fait implicitement ressentir tout au long de sa lecture. Toute personne lisant le livre a le choix de devenir un meilleur responsable de documentation ou un meilleur rédacteur technique. Mais dans la mesure où il (ou elle) gagne une meilleure compréhension de la mentalité d’un gestionnaire de documentation typique d’Amérique, alors peut-être deviendra-t-il (elle) certainement un(une) meilleur employé(e). Particulièrement s’il (elle) travaille pour une entreprise américaine.
Notes:
Managing Writers: A Real World Guide to Managing Technical Documentation
Richard L. Hamilton. 2009. Fort Collins, CO: XML Press. [ISBN 978-0-9822191-0. 266 pages, including glossary, bibliography, and index. US$24.95 (softcover).]

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